Au nom de l’égalité de traitement. Une nouvelle vision sur le suicide

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Lors des débats sur le « suicide assisté » au parlement valaisan, on a beaucoup entendu le mantra « au nom de l’égalité de traitement ».

Il a été martelé par le PS, les Verts, le PLR et une partie significative du PDC. Le grand héraut de cette égalité de traitement fut, bien entendu, l’incontournable Barbara Lanthemann, PS, qui n’a cessé de la répéter à temps et à contre temps.

« Au nom de l’égalité de traitement », il faudrait traiter de la même manière la personne en fin de vie, qui sait qu’elle va bientôt mourir et l’accepte, supportant les dernières épreuves de sa vie ET la personne qui, désespérée, décide de mettre fin à ses jours. Il faudrait mettre sur le même plan, la résignation et le désespoir. Il faudrait mettre sur le même plan, pour les spirituels qui seuls peuvent comprendre, l’Espérance et la désespérance.

Être en fin de vie OU décider de mettre fin à ses jours sont deux situations diamétralement opposées et vouloir traiter ces deux situations exactement de la même manière ne fait pas sens, sauf… sauf si l’objectif est de trouver le point pour faire basculer la société dans une nouvelle vision sur le suicide.

Et c’est là tout l’enjeu. Le débat doit amener le peuple à voir le suicide comme un acte équivalent à la mort naturelle, c’est « l’égalité de traitement ». Mais la balance reste rarement équilibrée très longtemps et « l’égalité » devient aussi le point de bascule où l’on finit par voir le suicide comme un acte supérieur à la mort naturelle. D’autant plus que tout est déjà programmé : la loi dans son article 1, alinéa 3 : « Toute personne a le droit d’exercer sa liberté personnelle pour mettre fin à ses jours dans la dignité. » ne considère-t-elle pas déjà que seul le suicide est un acte à la fois libre et digne ?

Il est inacceptable pour l’homme moderne de ne pas pouvoir choisir l’heure et les conditions de sa mort. Seule la mort programmée et de facto décidée par la personne sera reconnue par la société comme une mort à la fois libre et digne. Avec cette loi, on fait du suicide un acte éclairé.

Avec cette loi, on fait aussi de la mort un acte réglementé. Ironie de l’histoire, ce soi-disant « acte libre » est hyper codifié. Pas moins de 6 articles, comprenant 16 aliénas, dont 1 alinéa détaillé en 4 points, traitent du sujet. Est-ce vraiment la liberté qu’on exalte ? Non. Comme l’a très bien relevé à la fin du débat Pascal Salzmann, SVPO : « On ne peut même plus mourir sans avoir une loi ! » Et c’est le véritable objectif : tout doit être réglementé, jusqu’à votre dernier soupir.

On peut s’étonner de voir les libéraux adhérer à un tel totalitarisme. Mais, en réalité, cette débauche de réglementation ne sert qu’à donner bonne conscience aux promoteurs du suicide et à accuser de mensonge les opposants qui disent que cette loi ouvre les portes à la généralisation du suicide assisté. D’ailleurs, les organisations d’assistance au suicide ont démontré plus d’une fois vouloir repousser toujours plus loin les limites. Récemment encore le vice-président d’Exit, Pierre Beck, a été accusé d’avoir prescrit une substance létale à une octogénaire en bonne santé qui voulait mourir avec son mari malade. Loin de reconnaître une erreur, Beck a admis avoir volontairement dépassé les limites et a justifié son acte.

Il faut une mort clean. J’en veux pour preuve l’insertion d’un autre terme dans la loi, lui aussi répété comme un mantra : « la dignité ». A aucun moment dans la loi, ce terme est explicité. Qu’entend-on par dignité ? Rien de plus dangereux qu’une notion aussi équivoque et évolutive pour définir comment doit se terminer notre vie. Dans un rapport de 1998, publié par le President's Council on Bioethics, institution mise en place par Bill Clinton, Adam Schulman, soulignait toute l'ambiguïté et l'équivocité de la notion de dignité largement invoquée, lors des débats sur la bioéthique, dans des argumentations totalement opposées.

Oui, qu’entend-on par « dignité » ? C’est une notion qu’il faudrait surement définir lors de la deuxième lecture de la loi, à moins que les esprits progressistes, profitant de leur majorité, se contentent d’appuyer, comme ils l’ont fait lors des 74 amendements de la première lecture, sur le bouton vert, évitant ainsi tout débat de fond.

Car le leitmotiv peut se révéler dangereux : il faut finir sa vie dans la dignité, il faut mettre fin à ses jours dans la dignité… Les moments qui précèdent la mort sont rarement des moments faciles quand on est aux prises avec la souffrance et l’angoisse. Qui va décider du degré de votre dignité et déterminer les dignes moyens de mettre un terme à votre vie ?

Il est évident que le discours est biaisé. Si je suis vraiment libre, je n’ai pas besoin de loi qui me dise ce que je dois faire et comment je dois le faire. La nécessité même dans laquelle on se retrouve à devoir rédiger une loi encadrante est la preuve qu’il ne s’agit pas d’un acte libre. Le suicide est et restera toujours un acte de désespoir d’hommes et de femmes qui ne savent pas d’où ils viennent ni où ils vont.

Faire de l’État le garant du droit au suicide, c’est créer un État despote qui de fil en aiguille obtiendra le droit de vie et de mort sur ces citoyens. Inciter les gens à passer à l’acte en le légalisant est une démarche qui relève de l’obscurantisme, n’en déplaise aux progressistes qui croient marcher dans la lumière.

Olivier Dehaudt


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